dimanche 11 juin 2017

Yggdrasil


Qui sait que nausée abonde au pied du vieux géant ?
De Frija pour seul voile il ne reste que la nuit.
Je vois le tronc puissant qui jaillit de l’abysse,
Des fenêtres le percent pour scruter le néant.
Je vois dévaster le fût que seule une ombre étaye,
Des vies sans souci riant et par milliards pleurant.
Je vois les poutres maîtresses qui servent de palais,
Des ministres bruyants qui s’aveuglent s’assènent.
Je vois les éoliennes comme modernes girouettes,
De religieux ingénieurs en vantent les prouesses.
Je vois des fleurs qui s’égrènent aux vents de nulle part,
Des mains éparpillant l’allergique pollen.
Je vois dans la verdure que s’accrochent aux mères,
De petits gémissants qui acclament la gifle.
Je vois de maigres rameaux aux feuilles déjà jaunies,
Qui servent de fléaux à ces gamins séniles.
Je vois une badine dressée d’où sort le savoir
De l’élève grinçant la leçon d’une scie.
Je vois des fagots brûlants qui miment un triste jour,
Des feuilles vertes et rousses gémissent d’étincelles.
Je vois de fumants faisceaux qui font mouvoir les ombres,
Des petits yeux avides piquent une lumière froide.
Je vois une ramure où se cache la misère,
D’innombrables mendiants y étendent leurs griffes.
Je vois des branches tronquées quand portent le pain noir,
Des sentes sur le bois mûr les conduisaient au fruit.
Je vois la Nef franche qu’espèrent cent-mille coeurs,
De maints genoux ployés, qui pleurent l’ultime prière?
Je vois de tristes mâts en qui sombre l’espoir,
Des faces que nul ne croit s’y suspendent la nuit.
Qui sait que nausée abonde au pied du vieux géant ?
De Frija pour seule toile il ne reste que la nuit.
Voile...

E. Berlherm

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